De retour dans le placard

Etats-Unis, Massachusetts, Université de Natick.

Seamus Rafael Goldberg, mais appelez-le Rafe, gay, un goût assez prononcé pour la littérature et l'écriture, des parents aimants un peu originaux qui ont parfaitement vécu son coming-out, une meilleure amie Claire Olivia Casey (j'ai adoré le jeu de mots sur nom), intervenant actif dans plusieurs associations LGBTQ de sa ville de Boulder, Colorado, persuade ses parents de le laisser poursuivre ses études à plus de 3 000 kilomètres, dans le Massachusetts.

Refusant les étiquettes, voulant s'affranchir de toute pression, il décide d'effacer l'ancien Rafe et de commencer son année universitaire en faisant peau neuve, en ne parlant pas de sa sexualité. Et dès son arrivée, il va se trouver comme partagé en deux : d'un côté son colocataire Albie et son pote Toby, ne faisant pas clairement partie des plus populaires de l'université et de l'autre côté, Steve, Zack, Robinson, Bryce et Ben, les sportifs, pas homophobes mais...

Mais cette comédie se referme peu à peu sur lui et commence à lui peser et Ben est vraiment très attirant... et Albie et Toby sont des garçons très intéressants et attachants.

J'avoue avoir été un peu sceptique au départ, me demandant pourquoi un jeune homme parfaitement accepté dans sa ville natale voulait effacer l'ardoise et recommencer sur terrain vierge. Et en fait, au fur et à mesure que l'on découvre Rafe, on comprend peu à peu ses raisons et ses motivations, son envie d'être accepté juste pour lui dans des groupes qu'il ne côtoyait que de loin, d'être apprécié pour des qualités ou des compétences que personne ne voyait, lui qui n'était que le "gay" de la ville.

L'auteur interroge sur la question, bien légitime, des étiquettes et des clichés : est-on seulement défini par ce que l'on est ou par ce que l'on aime ou par qui l'on aime ? Ou est-ce juste une question de maturité pour s'accepter pleinement ?

Je découvre la plume de cet auteur, très fluide et agréable, malgré quelques coquilles trainant par ci, par là. Le fil rouge, ce travail d'écriture avec son professeur Monsieur Scarborough, est une vraie bonne idée et permet de comprendre comment Rafe en est arrivé là. La fin arrive de façon somme toute assez logique, nous sommes certes dans un roman mais pas dans un conte de fées et j'espère que la suite sera traduite, curieuse de savoir comment va se passer ce second semestre.

Merci à l'auteur, à NetGalleyFrance et à l'éditeur MxM Bookmark pour ce service presse.

Ce titre, c'est un peu par hasard que je me suis penchée dessus. Parce que cette notion de "retour dans le placard" me surprenait. Et après lecture, je dois dire que je l'ai beaucoup aimé.

Qu'on se le dise, ayant moi-même dû sortir du placard, je n'ai jamais été plus heureuse que depuis que c'est le cas. Mais, contrairement à Rafe, je ne l'ai pas vécue durant ma scolarité. Enfin si, mais sur la fin de mes études supérieures, alors qu'il y avait (au moins) un couple de lesbiennes totalement out dans ma classe. Donc je n'ai jamais eu ce catalogage de "la lesbienne de service" (ou bisexuelle à l'époque). Alors forcément, en tant que personne queer brandissant son étiquette comme un étendard avec fierté et revendiquant même sur le plan politique mon droit à exister et à vivre comme n'importe quelle personne hétéro, j'étais très intriguée par un titre qui proposait au contraire l'inverse de tout ce que je suis désormais.
Et bien que cela soit surprenant, j'ai très vite compris les raisons de Rafe et je trouve totalement légitime ce choix. Tout le monde ne vit pas le fait d'être LGBTQIA+ comme une fierté, comme quelque chose de cool qui mérite qu'on célébré ça. Et même quand c'est le cas, on a parfois aussi envie d'être "juste" une personne normale. Sans étiquette. Car qu'on ait choisi de l'affiché ouvertement ou pas, il est parfois difficile d'être constamment vu comme "la personne différente" au milieu de la masse.

Alors, lorsque Rafe à l'occasion de reprendre à zéro, il saisit sa chance. Et je trouve ça tellement compréhensible. Surtout vu le cercle dans lequel il vit à Boulder avec sa famille et sa meilleure amie Claire Olivia. Mais très vite le voir se heurté à certaines réalités, notamment qu'il pourra toujours cacher/mentir sur cet aspect là de lui-même, il ne pourra pas tout contrôler. Et notamment ses sentiments pour Ben, l'un de ses coéquipiers et amis.

Très vite ils vont passer de simples coéquipiers à amis puis meilleur amis voir plutôt bromance. Jusqu'à ce que tout dérape et que Rafe se retrouve face à l'évidence : il est tombé amoureux d'un mec qui est censé être hétéro mais qui ne l'est peut-être pas totalement mais qui, en tout cas, n'est clairement pas clair avec ses émotions, ses sentiments et son ressenti sur tout ça. Et je dois avouer que même si je savais que tout allait exploser à la figure de Rafe, je ne m'attendais pas à ce choix là pour la fin, imaginant que comme toujours cela finirait selon le schéma classique d'une romance. Mais ce parti pris est intéressant puisqu'outre le fait qu'il donne envie de lire la suite, il permet aussi de montrer qu'on ne peut pas tous et toutes pardonner en un claquement de doigt juste parce qu'on aime quelqu'un.

Pour parler des autres personnages, Toby et Albi m'ont beaucoup fait rire bien que parfois totalement bizarre. Mais c'est aussi ce côté bizarre qui les rend attachants et sympathique. Bien plus que les gars de l'équipe de foot avec qui Rafe se lie plus ou moins d'amitié au début et qui se révèlent surtout être homophobes et odieux.

L'histoire se lit vite, c'est plutôt bien rythmé et vraiment un truc sympathique à lire. Sans trop de prise de tête mais avec des réflexions intéressantes sur le fait d'assumer ouvertement qui on est, sur les étiquettes qu'on colle aux gens, et, évidemment, sur l'adolescence et cette période transitoire vers l'âge adulte où rien n'est vraiment simple.